Manifeste de la renaissance du théâtre africain

Le grand corps social africain est malade. L’âme, le cœur, la voix, la parole, l’esprit des africains ont été étouffé. Ils nous ont pris le chemin et la direction. Nous sommes donc en crise. Crise de confiance, identitaire, culturelle, économique, politique et social. Et tout cela est probablement due à ce que nous avons subis par le passé et qu’on continu de subir. Ce n’est pas de la lamentation mais une prise de conscience qui m’amène à la question suivante :
Qu’est-ce que nous faisons de ce que les autres ont fait de nous ? C´est pourquoi je pense qu´il est grand temps pour nous de renaitre pour rebâtir. Ma mission en tant que créateur africain, théâtreux dans cette renaissance, est de décoloniser le théâtre africain. Lui donner une identité propre qui n’est pas essentiellement lié à une langue vue que nous sommes des pays a multiples langues. Ce qui nous permettra de s’émanciper, d’être accessible et d’être plus
proche de notre publique. C’est la raison pour laquelle je préconise une renaissance du théâtre africain. Faire du théâtre africain un art total, complet et engagé qui coupe avec les barrières linguistiques. Un art total et complète qui rassemble les autres arts en son sein. Pour cela nous devons donc nous investir du savoir-faire rituel de nos aïeux et de leurs différentes formes de représentations ancestral pour donner un nouveau souffle au théâtre africain. C’est à dire repartir aux sources pour un nouvel élan. Créer du nouveau avec de l’ancien. Les rites sont pour moi l’océan de toutes les ressources nécessaires pour cette renaissance du théâtre africain. Comme le dit Victor Turner : « le rite est un magasin de savoir-faire et de savoir être ».
Ce magasin (rite) qui renferme la parole, la danse, la trance, le chant la musique et bien d´autres choses, sont pour moi de la performance. S’en inspirer pour créer le nouveau théâtre que nous pouvons identifier comme le théâtre africain qui aura pour influence les rituels et pour instrument premier le corps. Pour que la renaissance du théâtre africain soit complète, il faut qu’on le sorte aussi de sa boite noire. Faire des performances adaptables à tous les espaces possibles et inonder le continent de ce nouveau théâtre dans lequel il peut
s’identifier.
La raison de mon théâtre est de guérir mon continent de tout ce qui entrave son bien-être. Confronter mon continent a lui-même, a son histoire, a ses plus grandes peurs. Le théâtre est ma seule arme, notre seul remède. Fini le théâtre pour le théâtre : Le théâtre juste pour faire beau ou juste pour amuser le public. Si nous voulons réussir la guérison du continent et du monde, nous nous devons d’un théâtre qui pousse le spectateur jusqu’à des sentiments inconnus et extrêmes en transgressant, choquant, et bousculant ses habitudes et son confort pour qu’enfin il se pose des vraies questions sur sa propre existence. Les performances doivent rassembler ou s’appuyer sur les cinq sens du spectateur et du performeur. Mon théâtre ne se réservera pas à représenter le monde, mais à le présenter.
Mamadou SOMA, le 24 mai 2021